mardi 24 novembre 2020

Des docs sur les docs - 1 : "Dites 33"

C'est une formule tombée en désuétude. Pourtant elle fait partie de celles que l'on connait sans trop savoir au juste d'où elles viennent, ni à qui ou à quoi on les doit. "Dites 33", ça sonne comme un gag de film, de sketch ou de théâtre de boulevard.



On doit cette formule au docteur René Théophile Hyacinthe Laennec (1781-1826), génial médecin qui a apporté de nombreuses contributions à la médecine.




Tout n'est que "phtisie"

Au début du XIXème siècle, la médecine désigne d'un même nom toutes les maladies respiratoires, faute d'être en mesure de les distinguer et de les décrire scientifiquement.

La phtisie, c'était le nom générique qu'on leur donnait.


"Dites 33"

Au cours d'une promenade, le bon docteur Laennec observe des enfants qui s'amusent à communiquer grâce à la répercussion du son à travers une poutre.

Il existe de multiples versions de cette anecdote. Certaines la situent dans la cour du Louvre, d'autres dans la Bretagne natale du médecin. Certaines prétendent que les enfants jouent à taper des messages en morse que leurs petits copains doivent ensuite décoder à l'autre bout de la poutre, d'autres versions expliquent qu'ils grattent une aiguille contre le bois de cette même poutre.

Quelle que soit la version, le résultat est que la percussion permet d'amplifier les sons.

Mais pourquoi 33 ?

Laennec choisit de faire prononcer le nombre 33 à ses patients, car ses sonorités font vibrer tout l'appareil respiratoire. Ça déclenche un effet de caisse de résonnance qui permet d'entendre les bruits thoraciques.

Le petit cône acoustique

Le docteur Laennec invente le stéthoscope en 1816. Stéthoscope signifie littéralement : "Je vois dans la poitrine". C'est un instrument qui amplifie la perception des sons. Il permet à Laennec d'entendre "la musique intérieure" de ses patients.

À l'hôpital Necker, les apprentis-médecins fabriquent à tour de bras le rudimentaire mais fort efficace outil de diagnostique. Les premiers stéthoscopes sont de simples feuilles de papier roulées pour former un cylindre. Très rapidement, le bois remplace le papier.

Le procédé et l'auscultation des patients qui en découlent suscitent des moqueries dans la presse et le milieu médical. Laennec n'en a cure et poursuit ses travaux.

Un stéthoscope et une formule

Grâce au stéthoscope, le médecin répertorie l'ensemble des signes audibles lors de l'examen clinique. Au décès des patients, il confronte ces signes avec les observations collectées lors de l'autopsie. Au fil des années, il dresse un catalogue précis des diverses pathologies et des signes manifestes pour les repérer.

La médecine possède désormais un instrument fiable pour détecter les maladies cardiaques et respiratoires.


Le guide du médecin

En 1819, Laennec publie le Traité de l’auscultation médiate, une somme qui va bouleverser l'approche médicale et la prise en charge des maladies cardiaques et pulmonaires.

Avec les travaux de Laennec, la médecine gagne en rigueur scientifique et en qualité d'observation objective. Il est le créateur du diagnostique par auscultation. On lui doit le terme "mélanome", ainsi qu'une plus fine connaissance de la tuberculose, de la cirrhose (la fameuse "cirrhose de Laennec") et de la péritonite. Son nom est associé à d'autres pathologies qu'il serait sans doute fastidieux d'énumérer.


Grâce à lui, la médecine de Molière cède la place à une approche moderne. Et quelle distance parcourue jusqu'à notre époque ! Car nous sommes désormais dotés d'instruments d'exploration qui relèvent presque de la SF !

C'est pourquoi aujourd'hui vous ne dites plus 33.

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